Le maintien à long terme du poids perdu est le principal défi de la
prise en charge de l’obésité. La prise de poids est souvent observée
après une perte de poids chez les personnes en obésité.1
Alors pourquoi est-il si difficile de perdre du poids et de
maintenir cette perte?
Le professeur émérite de médecine et ancien président de la
recherche et de la prise en charge de l’obésité à l’Université
d’Alberta, le Dr Arya Sharma, a invité le directeur médical du
programme de gestion du poids à la clinique Medcan de Toronto, le Dr
David Macklin, à partager quelques réflexions à ce sujet sur son blog
« Notes sur
l’obésité du Dr Arya Sharma ».
Le Dr Macklin présente ici les sept principaux facteurs qui
contribuent à la reprise de poids et donne son point de vue sur ce que
devrait être une gestion réaliste du poids à long terme. Vous
trouverez le lien vers la publication originale ici.
1. BIOLOGIE
« La principale raison de la reprise de poids est la biologie. Le
cerveau se défend contre la perte de poids en raison d’un ancien
réflexe biologique. Si nos ancêtres perdaient du poids, ce n’était
pas pour être beaux pour un mariage ou pour la saison des maillots de
bain. À l’époque, la perte de poids était due à une maladie ou à une
interruption de l’apport alimentaire. En clair, se défendre contre la
perte de poids consistait à se défendre contre la mort.
Au cours des 30 dernières années, nous avons appris comment le
cerveau fonctionne à ce propos. Le cerveau est expert pour 1)
identifier la perte de graisse, 2) se défendre contre la perte de
graisse et 3) favoriser la reprise de poids. Le cerveau fait ça en:
a) augmentant l’appétit – la motivation pour l’apport calorique;
b) diminuant le taux métabolique.
L’augmentation de l’appétit semble jouer un plus grand rôle que le
ralentissement du métabolisme dans la reprise de poids. L’augmentation
de l’appétit, sous la forme d’une motivation accrue pour manger,
entraîne une augmentation de l’apport calorique global, ce qui
entraîne à son tour une reprise de poids.
Pour rappel, les autres raisons expliquant la reprise de poids
fonctionnent selon le mécanisme principal, la biologie »
2. FAIRE RÉGIME
« L’autre raison fréquente expliquant la reprise de poids est liée
aux régimes. Notez que les régimes ne sont pas efficaces pour
prévenir la reprise de poids. Les trois piliers pour empêcher la
reprise de poids sont plutôt la thérapie comportementale, les
médicaments et la chirurgie. En clair, le risque de prise de poids est
plus élevé avec une méthode de perte de poids s’apparentant à un
régime. Plus précisément:
a) si l’effort de perte de poids impliquait un engagement à
réduire l’apport calorique qui n’était pas tenable;
b) si l’effort de perte de poids impliquait un engagement à un
niveau et un type d’effort qui n’était pas tenable;
c) si l’effort de perte de poids n’était pas compatible avec un
engagement envers la valeur du plaisir, de la nourriture, des
boissons, des amis, de la socialisation et des voyages.
Le meilleur prédicteur pour déjouer la reprise de poids est
l’adhésion durable à la méthode utilisée pour perdre du poids. Les
méthodes ci-dessus prédisent une mauvaise adhésion. Elles prédisent
également que pour une personne perdant trop de poids, atteignant un
poids inférieur à ce qui est tenable, la biologie l’emportera.
Nous avons donc la définition du poids idéal. Pour atteindre son
meilleur poids, il faudrait faire le contraire d’un régime. Le poids
idéal est atteint en se tenant 1) à un niveau de calories tenable, 2)
à un effort durable, 3) tout en acceptant un engagement conscient de
la valeur du plaisir, de la nourriture, des boissons, des amis, de la
socialisation et des voyages. Le poids idéal est celui auquel vous
arrivez doucement lorsque vous vous tenez à un mode de vie qui est,
par définition, durable. »
3. UNE MODIFICATION DES REPÈRES, DES HORAIRES ET DE L’ENVIRONNEMENT
« La raison suivante et plutôt mal comprise de la reprise de poids
est un changement durable dans l’environnement d’une personne. Un
exemple courant serait celui d’une personne qui travaillait dans un
bureau et qui travaille maintenant à son domicile, ou l’inverse : une
personne qui travaillait à son domicile et qui travaille maintenant
dans un bureau. Un autre exemple est une personne qui, pendant la
perte de poids, a évité les environnements à haut risque afin de
perdre du poids et qui fréquente à nouveau ces milieux. Par exemple,
quelqu’un qui a évité temporairement un environnement social ou des
restaurants dans le seul but de perdre du poids. Les signaux dans nos
environnements physiques et sociaux déclenchent la réponse biologique
de l’appétit – l’envie – la motivation subconsciente de manger. Si
les signaux ressentis pendant la perte de poids changent, la reprise
de poids peut suivre. »
4. ARRÊT OU MAUVAISE OBSERVANCE DE LA THÉRAPIE COMPORTEMENTALE ET/OU DES
MÉDICAMENTS ANTI-OBÉSITÉ
« Si le traitement est interrompu, l’affection peut revenir. Il a été
démontré qu’une thérapie comportementale fondée sur des preuves, si
elle est poursuivie à long terme, offre une défense contre la reprise
de poids. Les médicaments anti-obésité (MAO) agissent en luttant
contre la biologie d’une personne. Les MAO luttent contre
l’augmentation de l’appétit et atténuent la motivation inconsciente de
l’apport calorique (envie). Si les MAO sont arrêtés ou pas respectés,
la défense contre la reprise de poids est perdue et la biologie fait
le reste. »
5. PENSÉE AUTO-CRITIQUE DÉMOTIVANTE QUI SUIT LES ÉCHECS
« Une raison très sous-estimée de la reprise du poids réside dans la
réponse d’une personne aux “ échecs de la perte de poids ”. Les échecs
courants de la perte de poids comprennent 1) les suites d’épisodes de
consommation d’aliments ou de boissons non conformes aux règles et 2)
les moments après avoir vu un chiffre défavorable sur la balance. À
moins de suivre une thérapie comportementale efficace, ces échecs
peuvent souvent être suivis de pensées autocritiques négatives et
d’émotions négatives, y compris la démotivation. Pourtant, c’est
précisément lorsqu’une personne a un poids plus faible qu’elle est le
plus sujette à ses facteurs biologiques de reprise de poids et qu’elle
est le plus susceptible d’avoir une consommation excessive et des
résultats défavorables sur la balance. Le dépistage et le traitement
de ces réactions cognitives inutiles constituent une partie importante
de la compréhension et du traitement de la reprise de poids. Pour
rappel, il s’agit probablement de la complication non biologique la
plus sous-estimée de la perte de poids. »
6. MÉDICAMENT(S) FAVORISANT LA PRISE DE POIDS
« La prise de poids peut être un effet secondaire possible de
nombreux médicaments régulièrement utilisés. Certains médicaments
provoquent plus fréquemment une prise de poids que d’autres et il
existe des différences significatives d’une personne à l’autre. La
reprise de poids peut être causée par l’ajout d’un médicament
favorisant le prise de poids et, si possible, une substitution peut
être faite pour un autre médicament plus neutre en poids. »
7. MODULATEURS
« Enfin, il existe une liste limitée d’états internes susceptibles de
favoriser la reprise de poids. Il est intuitif pour la plupart des
gens que le stress, la fatigue, le manque de sommeil, l’humeur
dépressive et la baisse d’activité peuvent favoriser la reprise de
poids. Pour de nombreuses personnes, en particulier dans un état de
poids corporel réduit, chacun de ces facteurs peut augmenter l’envie,
la motivation de manger et diminuer les capacités d’autorégulation
(restriction). Si une personne reprend du poids, il est impératif de
dépister chacun de ces modulateurs et de reconnaître comment un
changement dans l’un d’entre eux peut conduire à un apport calorique
plus élevé et à une reprise de poids. »
Le Dr Macklin ajoute une remarque importante concernant cette
liste : « Bien que la biologie soit la raison la plus importante et la
plus fréquente de la reprise de poids, les autres raisons peuvent
compliquer la raison principale. »